La France vit-elle au-dessus de ses moyens ?

La France vit-elle au-dessus de ses moyens ? En 2024, la dette française atteint plus de 3100 milliards d’euros, 110 % du PIB. Elle continue à croître, et est devenue en enjeu politique. Est-elle soutenable ? Comment en sortir ? Et par dessus tout, que signifient concrètement ces ordres de grandeurs abstraits ?

La France vit-elle au dessus de ses moyens ?

Un déficit structurel

Le budget de la France (comptes publics) est composé de trois parties : le budget de l’État, celui de la Sécurité sociale et celui des administrations publiques locales. En toute rigueur il faut y ajouter une quatrième composante, les organismes divers d’administration centrale (Météo France, le CNRS, le Commissariat à l’énergie atomique… etc.). Le total dépasse les 1600 Mds d’euros (684 pour le budget de l’État, 640 pour la sécu, 280 pour les collectivités locales).

Or, ces dépenses sont bien inférieures aux recettes perçues. On parle de déficit public. Le déficit public public est la différence entre les recettes et les dépenses des administrations publiques (État, collectivités locales, sécurité sociale), pour une année. En 2024, le déficit public français a atteint 5,1 % du PIB, soit 150 Mds d’euros. La France doit donc emprunter sur les marchés pour combler le déficit, ce qui creuse la dette.

Le problème est que ce déficit est structurel. Il se répète d’année en année, depuis les années 70 !

Par conséquent, la dette se creuse.

La soutenabilité de la dette : la France vit-elle au-dessus de ses moyens ?

Aujourd’hui, la dette française atteint 3160 Mds d’euros, soit 110,7 % du PIB. La France a besoin de s’endetter, non pour investir dans l’avenir, mais pour fonctionner au quotidien. La France vit-elle au-dessus de ses moyens ? Oui.

Le montant de la dette en elle-même ne pose pas problème. Par exemple, la dette du Japon atteint 220 % du PIB. Mais elle est largement détenue par des institutions japonaises.

En revanche, elle impose un certain nombre de contraintes.

Une contrainte budgétaire

Sur le plan budgétaire pour commencer. La charge de la dette est le montant du budget de l’État consacré à rembourser les emprunts. Ces fonds ne sont donc pas employables sur d’autres missions. Or, cette charge de la dette devrait augmenter de manière significative dans les années à venir. En 2024, la charge de la dette est d’environs 50 Mds d’euros. C’est déjà un budget de la défense d’il y a quelques années. Mais elle pourrait atteindre 74 Mds en 2027 !

La France a pu par le passé emprunter à des taux très bas, voire négatifs. Mais dès que les intérêts augmentent, la charge de la dette suit le mouvement, avec quelques années de retard.

Perte de liberté d’action politique

Au niveau politique ensuite, elle permet aux détenteurs du capital de faire pression sur les politiques menées. En effet, si la France a besoin d’emprunter, alors elle est dépendante envers les marchés, qui décident du taux auquel Paris s’endette. Or, les choix politiques hexagonaux vont peser sur les marchés. La perspective d’une victoire du Nouveau Front Populaire aux élections législatives de 2024 effrayait les marchés. Alors même que le déficit français hérité du Président Sarkozy avait commencé à se réduire sous François Hollande.

Dans Du temps acheté, Wolfgang Streeck note que la dette met les États dans la main des marchés. Elle limite de fait l’étendue des politiques envisageables, ce qui contribue à « stériliser » la démocratie.


Enfin, la dette met les États dans l’incertitude du lendemain. Les taux d’intérêt sont définis de manière complexe. Ils dépendent largement de facteurs psychologiques, non rationnels, et d’acteurs privés comme les agences de notation. Comme en 2022 – 2023, les conséquences d’une crise, par définition imprévue, peuvent obérer la capacité de l’État à s’endetter à taux bas. In fine, c’est la confiance dans la capacité d’un État à rembourser sa dette qui détermine le taux d’intérêt. S’il est visible que la confiance dans la dette française s’érode au fur et à mesure de la baisse de sa notation, les chocs majeurs demeurent difficilement identifiables.

Il apparaît donc souhaitable de réduire la dette, pour retrouver une liberté d’action budgétaire et politique.

Quelles solutions pour réduire la dette ?

La France vit donc au-dessus de ses moyens. La dette française pourrait perdre son caractère soutenable à plus ou moins brève échéance. L’état français possède cependant un certain nombre de leviers pour la réduire.

Réduire les dépenses publiques, la fausse bonne idée ?

Le premier, le plus évident, est la réduction des dépenses publiques. Si la France est obligée de s’endetter, c’est qu’elle dépense trop. Il suffirait de dépenser moins ! Toutefois, une réduction excessive de la dépense publique pourrait s’avérer contre-productive. En effet, la dépense publique possède un effet entraînant sur la création de richesse. À court terme, un effort d’investissement public crée une politique de l’offre. Les entreprises répondent aux commandes publiques, et créent des infrastructures ou produisent des services payés par l’argent public.

À plus long terme, les entreprises ont besoin d’employés bien formés, d’infrastructures publiques, de sécurité, de coups de pouce financiers aussi pour réussir. Réduire les dépenses au moyen d’une politique d’austérité pourrait avoir pour conséquence la chute de la richesse produite… et l’augmentation de la dette.

Est-il encore possible d’augmenter les impôts ?

Le deuxième, l’augmentation des impôts. Le taux d’imposition en France est déjà très élevé, d’autant qu’à un certain niveau les impôts sur les entreprises peuvent s’avérer contre-productifs en matière de création, et donc de captation de richesse. Il reste cependant des marges de manœuvre, notamment sur les ultrariches qui sont moins imposés que la classe moyenne (ou ce qu’il en reste, lire aussi Christophe Guilluy, No society. La classe moyenne a-t-elle disparu ?). Toutefois, même en mettant davantage les plus fortunés à contribution, les gains financiers devraient être symboliques tant la population concernée est réduite.

Dans l’absolu, si la fiscalité peut faire partie de la solution à la dette, elle ne saura la résorber seule. Pour rappel, le déficit public en 2024 est de 150 Mds d’euros. Pour le combler, il faudrait multiplier l’impôt sur le revenu ou la TVA par 2,5 !

Réduire la datte par la croissance

Le troisième levier est la croissance. Si la dette se mesure en points de PIB, alors il n’y a qu’à augmenter le PIB pour en réduire le poids, et générer davantage de ressources fiscales. Là encore, il existe plusieurs approches.

Tout d’abord, la relance par l’investissement public. L’État s’endette pour passer des commandes aux entreprises privées, qui croissent et vont à leur tour passer commande à leurs fournisseurs, embaucher… et in fine payer plus d’impôts ce qui permettra de réduire la dette. La dette crée de la croissance qui annule la dette. Un cercle vertueux, mais qui doit être initié par plus d’endettement.

Une autre approche est de favoriser les investissements étrangers tout en assouplissant le marché du travail, pour rendre l’hexagone plus attractif. L’objectif est de restaurer la confiance des détenteurs du capital, qui hésiteront moins à investir en France et à y créer de la richesse. Problème, cette approche se concrétise au détriment des plus démunis, qui sont par ailleurs les premières victimes de la réduction de la dépense publique.

Laisser filer l’inflation

Autre solution, laisser l’inflation augmenter pour diminuer mécaniquement la valeur de la dette. En effet, lorsque les prix montent, les revenus fiscaux augmentent grâce à des bases imposables plus élevées, tandis que la valeur des dettes contractées à taux fixe diminue en termes réels. Cela crée une opportunité pour les États de réduire leur ratio dette/PIB sans recourir à des politiques d’austérité drastiques. De plus, l’inflation favorise les emprunteurs au détriment des créanciers, redistribuant ainsi une partie de la richesse.

C’est ainsi que les dettes des deux guerres mondiales ont été épongées. De 1945 à 1975, de nombreux pays européens, confrontés à des niveaux élevés d’endettement, ont laissé l’inflation s’installer. En France, par exemple, l’inflation moyenne de cette période, combinée à une forte croissance économique, a permis de réduire considérablement la charge réelle de la dette publique. Ce « désendettement par l’inflation » s’est avéré efficace sans nécessiter de mesures d’austérité sévères.

Cependant, cette stratégie n’est pas sans risque. Une inflation incontrôlée peut entraîner une perte de pouvoir d’achat pour les ménages, surtout pour les plus modestes. De plus, elle peut miner la confiance des investisseurs. Cela peut entraîner une hausse des taux d’intérêt et ainsi rendre les emprunts futurs plus coûteux.

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À la question La France vit-elle au-dessus de ses moyens ?, force est de répondre par l’affirmative. Les dépenses sont structurellement supérieures aux recettes. L’endettement donne l’illusion que cet écart est indolore. Mais le prix de cette illusion est la réduction de la liberté d’action politique.

Des solutions existent pourtant, mais il n’est pas impossible que dans un avenir plus ou moins proche la sortie de l’illusion soit brutale.

Lire aussi La théorie des ordres selon André Comte-Sponville dans « Le capitalisme est-il moral ».

Pourquoi l’industrie de défense française peine à soutenir l’Ukraine

Dans une interview télévisée du 14 mars 2024, le Président français a reconnu que la France n’avait pas « une industrie de défense adaptée à une guerre de haute intensité territoriale ». En effet, les entreprises françaises peinent à soutenir massivement l’Ukraine. Ainsi, la France et l’Europe connaissent des difficultés pour produire des obus d’artillerie, pourtant nécessaires en grande quantité en Ukraine. Pourquoi l’industrie de défense française peine-t-elle autant à soutenir l’Ukraine, alors que Paris est devenu le deuxième exportateur d’armes au monde ?

Canon Caesar en Irak. Ce type de matériel fait merveille en Ukraine. Pourtant, l'industrie  de défense française peine à soutenir Kiev.
Canon Caesar en Irak. Ce type de matériel fait merveille en Ukraine. Pourtant, l’industrie de défense française peine à soutenir Kiev.

En cause, le modèle d’armée que soutient cette industrie. L’industrie de défense française produit du matériel de haute technologie, cher, en petit nombre.

Arme nucléaire et armée de masse

La sanctuarisation du territoire français rend inutile une armée de masse.

La France est une puissance nucléaire. Ses intérêts vitaux, au premier desquels son territoire, sont sanctuarisés par la dissuasion. Elle n’a donc plus besoin d’une armée de masse, de conscrits.

Les armées contribuent à la sûreté du territoire contre les attaques terroristes, qui ne peuvent être évitées grâce à la dissuasion. Mais c’est sur la masse de la police que repose surtout cette protection dans ce cas précis.


Pour aller plus loin sur la dissuasion : amiral Pierre Vandier, La dissuasion au troisième âge nucléaire, Monaco, éditions du Rocher, 2018. Si vous achetez le livre grâce à ce lien, vous faites vivre le site.

Une armée expéditionnaire

Son armée lui sert donc bien davantage à protéger ses intérêts à l’étranger.

Elle utilise ses forces armées pour réduire la menace terroriste qui pèse sur elle depuis l’étranger. Par exemple, les armées françaises ont activement contribué à réduire la capacité de nuisance de Daech en Irak. Elles défendent aussi les intérêts économiques de la nation, en protégeant des Houthis les navires qui transitent par le détroit de Bab el-Mandeb.

Elle a donc besoin d’une force facilement capable de se projeter à l’étranger et de s’y maintenir. Cela implique une taille limitée par les moyens de projection et de soutien détenus (navires, avions de transport stratégiques…).


Pour aller plus loin sur le modèle d’armée : Guy Brossolet, essai sur la non-bataille. Si vous achetez le livre grâce à ce lien, vous faites vivre le site.

Haute technologie

Sanctuarisation du territoire et capacité de projection de puissance font donc converger le modèle d’armée français vers une armée de taille limitée.

Pour garder sa supériorité malgré cette taille réduite, l’armée française a donc besoin d’hommes supérieurement entraînés, capables de manier des systèmes d’armes complexes, de haute technologie.

Cet équipement à la pointe de la technologie est évidemment très onéreux, en partie parce qu’il est produit en petites séries. Par exemple, un simple obus de 155 mm « de base » coûte environ 5000 euros. Les délais de production sont par ailleurs assez longs. Il faut compter deux ans de fabrication pour un canon Caesar.

Cela explique aussi que la base industrielle et technologique de défense (BITD) soit forcée d’exporter pour survivre. Le marché français n’est simplement pas assez grand pour garantir la pérennité d’entreprises privées.

Une industrie de défense peu adaptée à la guerre de masse

La BITD française produit donc des équipements très efficaces, mais très chers, et en nombre réduits. Or, quels sont les besoins des Ukrainiens ? De l’armement en nombre, des obus en masse, facilement utilisable par des conscrits ayant au mieux quelques semaines de formation.

La BITD française n’est donc tout simplement pas configurée pour soutenir l’Ukraine dans une guerre de masse, territorialisée.

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Les enjeux de défense ne sont pas les mêmes pour Paris ou Kiev. La BITD française soutient une armée de taille réduite, qui utilise des équipements de haute technologie, très onéreux, en petit nombre. Or, c’est tout l’inverse dont ont besoin les Ukrainiens. Équipements simples, abordables, en grand nombre.

C’est donc un virage à 180° que l’on demande, en un temps très court, à notre BITD. Elle n’est effectivement pas configurée pour la guerre de masse.

Toutefois, ce virage pourrait être pris plus vite qu’on ne le croit. L’Europe s’organise pour optimiser son aide à l’Ukraine. Ainsi, la France a pris la tête de la « coalition artillerie » qui met en contact les industriels et les besoins ukrainiens. Mais surtout, d’une manière particulièrement cynique, les entreprises de défense sont des entreprises privées. Elles peuvent espérer faire des profits très importants en Ukraine, tant les Européens sont prêts à sortir leur carnet de chèques. Nul doute qu’elles sauront s’adapter pour capter les milliards qui sont en jeu.

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Se dirige-t-on vers une guerre contre la Russie ?

Le Président français Emmanuel Macron a annoncé le lundi 26 février qu’un engagement de troupes occidentales en Ukraine n’était plus exclu. Alors, se dirige-t-on vers une guerre contre la Russie ? Comment en est-on arrivés là ?

Des propos rassurants sont immédiatement venus nuancer la déclaration française. Les alliés ne comptent pas s’engager, le déploiement ne concernerait que des unités de déminage. Mais le signal est trop fort pour être ignoré. Allons plus loin.

Une guerre entre la France et l'Ukraine ?

Un affrontement en cours entre la France et la Russie dans le milieu informationnel

Dressons le cadre. La France et la Russie s’affrontent déjà, mais de manière indirecte en Ukraine ainsi que dans les champs immatériels.

Au Sahel, la Russie utilise le sentiment antifrançais pour avancer ses pions. En 2022, elle a tenté de discréditer l’action de la France au Mali en installant un charnier près de Gossi. Les forces françaises avaient éventé le subterfuge en diffusant les images de l’enterrement des corps. Le charnier était bien réel, mais du fait de Wagner.

Plus récemment, Moscou s’est livré à plusieurs attaques informationnelles contre la France. La Russie a mis en place plusieurs campagnes de désinformation, en répliquant des unes de sites internet de grands médias français afin d’y insérer sa propagande (opération Doppelgänger). Elle a également créé des portails spécifiquement dédiés à la diffusion de son récit (opération Portal Kombat).

De son côté, la France livre des armes et des munitions en Ukraine. Le canon Caesar a déjà joué un rôle important sur le champ de bataille, de même que les systèmes sol-air livrés par la France. Mais surtout, Paris a fourni à Kiev un grand nombre de missiles de croisière SCALP à très haute valeur ajoutée.

Les armes françaises font donc déjà couler le sang russe. Cependant, ces livraisons, de même que la formation des soldats ukrainiens dans l’hexagone, ne suffisent pas pour faire de la France un co-belligérant sur le plan juridique.


Pour aller plus loin sur la Russie : Dans la tête de Vladimir Poutine.

Une dynamique du conflit aujourd’hui favorable à la Russie

Pourquoi dès lors faire monter les enchères et évoquer un envoi de troupes occidentales en Ukraine ? Il faut en rechercher la cause dans la dynamique actuelle du conflit et dans la crainte d’une défaite ukrainienne.

Aujourd’hui, la dynamique du conflit est favorable à la Russie. Les Européens craignent un effondrement ukrainien. S’il est improbable à court terme, il ne peut être exclu. La Russie s’est remise de ses pertes et est repassée à l’offensive. Elle s’est emparée à la fin du mois de février de la ville d’Avdiivka, après des mois de combats acharnés.

L’aide matérielle occidentale est donc tout à fait nécessaire, mais non suffisante pour assurer la victoire de l’Ukraine. Or, elle atteint ses limites, en raison de l’inadaptation du complexe militaro-industriel occidental à la guerre de masse. Celui-ci est en effet conçu pour armer des forces professionnelles d’équipements de haute technologie, en petit nombre et donc très chers.

Dans ces conditions, la déclaration de M. Macron constitue un signal envoyé à M. Poutine. Le président français n’annonce pas l’envoi de troupes ; il évoque le sujet. Cette petite phrase ne passera cependant pas inaperçue à Moscou. Il s’agit pour la France de peser sur les calculs russes en montrant qu’elle est toujours déterminée à soutenir l’Ukraine. Paris souhaite également poser davantage de dilemmes à la Russie. Renouer, pour ainsi dire, avec l’ambiguïté stratégique.


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Conséquences d’une défaite ukrainienne

Mais pourquoi s’acharner à ce point en Ukraine ? Quelles seraient les conséquences d’une défaite ukrainienne ? Toute la question est bien là. En réalité, au cœur des réactions occidentales à la dynamique du conflit se trouve la crainte d’une paix trop favorable à la Russie. Elle modifierait considérablement l’architecture de sécurité et les rapports de force en Europe, voire dans le monde.

Il résulterait d’une paix trop favorable à la Russie une modification considérable des rapports de force en Europe, et probablement dans le monde. Les démocraties occidentales en sortiraient durablement décrédibilisées, tant elles ont fait de ce conflit une lutte existentielle. Le récit russe d’un Occident décadent et faible serait conforté.

L’architecture de sécurité européenne n’y survivrait pas. La Russie aurait démontré que l’Occident n’est plus capable de s’opposer à l’emploi illégal de la force militaire. Moscou aurait alors beau jeu de tirer avantage de sa supériorité militaire pour imposer ses vues à des Européens désunis et militairement faibles. Le désarmement européen a par ailleurs très probablement compté dans les calculs russes en février 2022. Les doutes qui planent sur la fiabilité américaine au sein de l’OTAN viendraient parachever la nouvelle vulnérabilité militaire de l’Europe. Moscou pourrait rouvrir des contentieux sur le vieux continent, par exemple dans les pays baltes au sujet du corridor de Suwalki.

Cependant, à quoi ressemblerait une défaite russe ? Que penser d’une paix dans laquelle l’Ukraine renoncerait au Donbass et à la Crimée, dont le retour dans le giron de Kiev paraît de plus improbable ? Ce n’est ni à la France, ni même aux États-Unis de le dire. C’est à l’Ukraine, et à la Russie. C’est tout le paradoxe de la position des Européens. Ils s’engagent toujours plus avant dans leur soutien à Kiev, en s’en remettant aux buts de guerre ukrainiens. A lier son sort au combat d’un autre, on lui donne la clef de son destin.


Pour aller plus loin : Que veut Poutine ?

Une guerre contre la Russie ?

In fine, les modèles d’armées européens ne sont plus adaptés à la guerre de masse. À l’heure où l’allié américain doute, les Européens sont trop faibles pour que l’Ukraine perde la guerre. Nul doute que le 24 février 2022 a ouvert la page d’un monde nouveau, cauchemardesque pour ceux qui pensaient la guerre révolue et qui souhaitent encore toucher les « dividendes de la paix ».

Les Européens voient ressurgir le spectre de Munich. En 1938 ils avaient cru sauver la paix alors qu’ils venaient de finir de convaincre Hitler de leur lâcheté. La déclaration du président français s’inscrit dans ce contexte intellectuel.

En renversant la perspective, la question n’est peut-être pas de savoir si les Européens parviendront à éviter la guerre, mais s’il n’est pas déjà trop tard pour le faire.


Lire aussi Arès et Athéna, dieux de la guerre.

L’école française est-elle encore républicaine ?

Accusée de perpétuer les inégalités sociales ou d’être impossible à réformer, l’école française subit un certain nombre d’attaques et de tensions. Or, elle est au centre du projet républicain.

Le modèle de l’école républicaine française est-elle à la hauteur des attentes que la nation met en elle ?

Malgré ses difficultés, l’école française demeure profondément républicaine.

Des perspectives aussi sombres qu’un tableau noir pour l’école républicaine ?

I. Un idéal : former le citoyen.

L’école possède une place fondatrice dans l’idéal républicain. Elle est régie par des principes clairs issus des lois scolaires de la fin du XIXe siècle (lois Ferry, 1881 – 82).

L’instruction est obligatoire, gratuite et universelle. Dans les lois Ferry, l’instruction est obligatoire de 6 à 13 ans, pour les garçons comme pour les filles. Ce n’est pas l’école qui est obligatoire, c’est l’instruction, qui peut être donnée au domicile ou à l’église. De fait, le jeudi était laissé libre pour que les enfants puissent aller au catéchisme. Mais l’école publique est devenue gratuite et universelle.

L’école est un instrument de l’unité de la république. Au XIXe siècle, elle était le principal facteur de nationalisation de la société. L’enseignement dans l’école publique est laïque et en langue française. L’usage des langues locales est interdit. Aujourd’hui, la mission de l’école est toujours de transmettre les connaissances, mais aussi les valeurs de la république. 

Plus récemment, l’école a reçu la mission de corriger les inégalités sociales, ou plutôt de favoriser l’égalité des chances. En 1981, le gouvernement créée les ZEP pour donner plus de moyens aux secteurs en difficulté (appellation de 2014 : REP, Réseaux d’Éducation Prioritaires, ou RAP, Réseaux Ambition Réussite, RRS, Réseaux de Réussite Scolaire).

Mais cet idéal républicain est aujourd’hui mis en tension parce que l’école ne parvient pas à diminuer les inégalités sociales.

II. La diminution des inégalités sociales : mission impossible.

Cette mission de réduction des inégalités sociales est une mission que l’école ne peut accomplir.

L’école française ne parvient pas à ne pas reproduire les inégalités sociales. Le classement PISA de 2016 révèle que l’école française est celle des pays de l’OCDE où l’origine sociale des enfants pèse le plus dans les résultats. (Classement PISA : tous les 3 ans, mesure les résultats d’élèves de 15 ans dans 70 pays. La France est environ 26e). Selon une étude de l’INSEE menée entre 1982 et 1992, la création des ZEP n’a eu aucun effet.

En effet, le système français est très élitiste. Les grandes écoles ont l’ambition de former l’élite de la nation. On consacre aux étudiants des CPGE 15 000 euros par an et par élève, contre 10 000 pour l’université. On y retrouve une grande proportion d’étudiants venus des classes les plus favorisées. Les concours des grandes écoles valorisent les savoirs acquis hors milieu scolaire, par exemple avec les épreuves de culture générale qui favorisent la culture des classes dominantes. Enfin, les élèves doivent choisir leurs options de plus en plus tôt, ce qui contribue à la reproduction des inégalités sociales.

En dernière analyse, l’école est le moyen des classes dominantes pour pérenniser leur domination. Elle ne peut donc pas réduire les inégalités sociales — seule la loi le peut, lorsqu’elle agit dans la sphère économique, et par l’impôt. Les classes dominantes possèdent une connaissance intime du système. Elles l’ont pratiqué puis modelé. Elles peuvent donc mettre en œuvre des stratégies de réussite scolaire pour leurs enfants. Par exemple, les différentes couches de la société ont l’impression d’être « à leur place » dans les filières qui correspondent à la reproduction de leur statut. Enfin, tous les diplômes ne se valent pas. Un BAC +5 ne mène pas aux mêmes perspectives qu’il soit en arts ou de HEC (qui est privé). Ainsi la réussite scolaire n’est pas en soi un vecteur de réussite sociale.

En parallèle de l’incapacité de l’école à réduire les inégalités sociales, son universalisme est contesté.

III. Un universalisme en tension, mais toujours valide.

L’universalité de l’instruction est aujourd’hui mise en tension, par l’enseignement privé, les élèves déscolarisés, et les enseignements en langue locale, mais elle reste opérante.

S’il est incompatible avec la notion d’égalité, l’enseignement privé est compatible avec la laïcité et ne met donc pas en péril l’idéal républicain de l’école. Près de 20 % des élèves français sont scolarisés dans le privé. Le statut de l’école privée date des lois Debré de 1959. Les 7500 établissements privés sous contrat suivent les programmes de l’éducation nationale. Les établissements confessionnels doivent accepter les élèves de toutes religions. C’est l’État qui rémunère les enseignants. Des cours de religion peuvent être proposés en plus des cours obligatoires. Les 1300 établissements d’enseignement privés hors contrat (dont 300 établissements confessionnels) eux ne sont tenus d’enseigner qu’un socle de connaissance. L’enseignement privé répond à un besoin : il faut un besoin éducatif avéré pour ouvrir une école privée. En outre, en 1984, 2 millions de personnes sont descendues dans la rue pour défendre l’enseignement privé.

Si le nombre d’enfants non scolarisés est toujours trop important, cela ne signifie pas que l’école a failli à sa mission. Environ 100 000 enfants ne sont pas scolarisés. Il s’agit d’enfants de migrants ou d’exclus. Mais le fait que l’attention se porte sur eux montre une sensibilité plus grande de la société et une plus grande adaptation des pouvoirs publics.

Le développement des enseignements en langue locale, s’il se poursuit, pourra lui menacer l’idéal de l’école républicaine. Il s’agit des écoles en basque, breton, catalan, occitan, alsacien-mosellan, qui scolarisent 15 000 élèves et dont les enseignants sont payés par l’État au titre d’une convention. Ce nombre est en augmentation constante, et les demandes excèdent largement les places disponibles. Même si elles répondent à une demande particulièrement forte, elles pourront contribuer à faire renaître des revendications régionales, qui à l’heure où le rôle central de l’État et le modèle républicain sont contestés par la puissance des multinationales et le multiculturalisme, pourront à terme menacer l’unité de la république. Mais les mentalités en sont plus les mêmes qu’au XIXe siècle, et peut-être l’idéal républicain devra-t-il s’accommoder d’un multilinguisme.

Si l’idéal de l’école républicain est mis en tension, les pouvoirs publics s’efforcent véritablement de faire correspondre l’école à cet idéal.

IV. La poursuite de l’idéal républicain est une réalité.

Les réformes menées ces dernières années tendant à faire se rapprocher l’école de son idéal républicain.

L’État consent un effort important pour l’instruction publique. Le budget du ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports est de 75 milliards d’euros (enseignement scolaire et supérieur). Il emploie 1 million de personnes, dont environ 800 000 enseignants. C’est le ministère le mieux doté.

L’école est toujours plus universelle, toujours obligatoire et toujours plus gratuite. Ainsi l’allocation de rentrée scolaire, d’environ 400 euros par enfant, permet d’acheter des fournitures. Depuis 2019, l’instruction est obligatoire de 3 (et non plus 6) à 16 ans. Au total, on compte 6 millions d’élèves dans le 1er degré, 6 millions dans le 2d degré.

L’école est toujours plus inclusive. Les Auxiliaires de Vie Scolaire (AVS, créés en 2003) et la loi de 2013 sur l’école inclusive permettent aux élèves handicapés d’assister aux cours d’une classe ordinaire. Les enfants de migrants sont eux aussi scolarisés dans le système normal dès qu’ils ont un niveau en français suffisant.

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Si l’école fait face à des tensions quant à sa mission de réduction des inégalités sociales et à son universalisme, force est de constater qu’elle est toujours, et toujours plus républicaine.

La question est de savoir si elle saura le rester face à une idéologie néolibérale dominante qui tend à chercher à privatiser de plus en plus de secteurs de la société, et qui s’accompagne de fortes revendications identitaires comme le note Gilles Dorronsoro dans Le reniement démocratique.

Voir aussi La crise de l’autorité

LA COOPÉRATION DE DÉFENSE FRANCO-BRITANNIQUE

La coopération de défense franco-britannique est très dynamique depuis les accords de Lancaster House en 2010. Cependant, alors qu’il avait initialement été développé par la France et le Royaume-Uni, le Système de Combat Aérien du Futur (SCAF) a dû être relancé dans une dynamique franco-allemande. Aujourd’hui la réalisation du Brexit ajoute une inconnue supplémentaire.

La coopération de défense franco-britannique est-elle à l’épreuve du Brexit ?

Comme les relations de défense entre les deux pays passent peu par l’UE, le Brexit ne devrait pas influer à court terme sur la relation de défense franco-britannique. Néanmoins, à long terme, les deux pays pourraient s’éloigner. En effet, leurs horizons stratégiques pourraient s’avérer différents.

Une coopération de défense franco-britannique profondément ancrée entre deux partenaires de longue date.

La coopération de défense franco-britannique peut s’appuyer sur une amitié de longue date entre les deux nations et sur des cultures militaires très proches.

La coopération de défense franco-britannique est formalisée par des traités depuis plus d’un siècle. L’entente cordiale de 1904 était déjà un traité d’alliance défensive. Après la Deuxième Guerre mondiale, en 1947, la solidarité franco-britannique a été réaffirmée dans le traité de Dunkerque. Plus récemment, en 1998, grâce à la déclaration de Saint-Malo, la France et le Royaume-Uni se rapprochent un peu plus sous l’égide de l’UE.

La coopération opérationnelle existe elle aussi de longue date. Les deux pays ont combattu côte à côte dans les deux guerres mondiales, ainsi qu’à Suez. En 1992 est créée la commission nucléaire conjointe, puis en 1994 c’est un groupe aérien conjoint qui voit le jour.

Les deux pays ont des cultures militaires très proches. Ils disposent de l’arme nucléaire, sont membres du Conseil de Sécurité de l’ONU, possèdent des armées de taille équivalente (150 000 militaires outre-Manche) avec une culture de la projection de force (même si depuis l’intervention en Irak, le parlement britannique est réticent à envoyer des troupes outre-mer). Ils entretiennent aussi tous deux une Base Industrielle et Technologique de Défense puissante.

Leurs intérêts convergent. Face au terrorisme islamiste d’une part (attentats de Londres en 2005 et 2017 et de Paris en 2015), mais aussi en tant que leaders européens de la défense, car les deux pays représentent à eux seuls 50 % des dépenses militaires de l’UE, et 80 % de sa Recherche et Développement. Ils font face à des défis communs, tels que la quête de puissance de la Russie ou de l’Iran.

Le traité de Lancaster House est venu renforcer cette amitié de longue date.

Les accords de Lancaster House, à la base d’une coopération bilatérale solide.

Signé en 2010, le traité de Lancaster House a posé les bases de la coopération bilatérale future entre la France et le Royaume-Uni. Il possède plusieurs aspects.

Volet capacitaire

Paris et Londres ont pour ambition de développer un certain nombre de systèmes d’armes en commun, comme le Système de Lutte Anti-Mines du Futur, qui devrait être un système de drones de surface et sous-marins, ou le développement d’un drone commun (aujourd’hui à l’arrêt).

La CJEF

Le traité pose les bases d’une Force Interarmées Expéditionnaire Conjointe, la CJEF (Combined Joint Expeditionary Force). Les deux nations doivent pouvoir déployer en commun une force ad hoc de 10 000 hommes sur court préavis, composée d’au moins 2 GTIA, un groupe naval, une escadre aérienne et des éléments logistiques avec leurs éléments de commandement de tous niveaux, afin de mener des opérations de haute intensité. Elle devrait être pleinement opérationnelle en 2020, mais n’a jamais été utilisée.

Volet industriel

MBDA est un missilier franco-britannique. La stratégie One MBDA vise à accroître l’intégration des parties française et britannique de l’entreprise, ainsi qu’à créer des pôles d’excellence des deux côtés de la Manche. MBDA est chargé de développer le Missile Antinavire Léger et le Futur Missile de Croisière qui devraient équiper les armées françaises.

Volet nucléaire

Paris et Londres partagent leurs installations de simulation d’essais nucléaires, notamment le site de Valduc. Un site de simulation commun devrait voir le jour au Royaume-Uni. L’économie espérée n’est cependant que de 40 millions d’euros par an.

Toutefois, la dissuasion britannique demeure dépendante des États-Unis, car les missiles utilisés par Londres sont américains (les têtes et les sous-marins, en revanche, sont britanniques) et les sous-marins doivent faire des escales régulières aux États-Unis pour faire entretenir ou changer leurs lanceurs. Si elle n’a pas besoin de l’accord de Washington pour faire feu, la dépendance de la dissuasion britannique envers les USA rend Londres vulnérable à des pressions politiques au sujet du renouvellement des missiles.

UNE coopération opérationnelle solide

Les deux pays ont mené des opérations conjointes en Libye. En Estonie la France a déployé un SGTIA sous commandement britannique, à Barkhane les Anglais ont engagé des Chinooks. 60 officiers britanniques sont insérés dans les structures militaires françaises. Par exemple, un des officiers mécaniciens du porte-avions CDG est britannique.

La coopération bilatérale franco-britannique de défense est donc très développée et dynamique. Cependant, cette relation est enchâssée dans des relations multilatérales plus complexes.


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Des relations multilatérales plus complexes

La relation de défense franco-britannique passe aussi par des logiques multilatérales, qui ne sont pas exemptes d’ambiguïtés.

L’OTAN est aussi un lieu de coopération

L’interopérabilité des deux armées, nécessaire à la CJEF, passe par l’OTAN. C’est l’Alliance qui uniformise les procédures. Or, les Britanniques considèrent que leur défense et celle de l’Europe passent en priorité par l’OTAN. La coopération bilatérale s’articule donc autour de cet élément clef, et doit éviter de faire doublon avec l’Alliance atlantique.

L’Union européenne

Les relations de défense entre les deux pays passaient aussi par l’UE, mais dans une moindre mesure. Depuis la déclaration de Saint-Malo en 1998, les Britanniques ont accepté de participer à l’Europe de la défense. Le Royaume uni prend part au Comité Militaire de l’UE, et un général britannique a commandé l’État-Major de l’UE. Le pays a participé à l’état-major d’Eufor RDC, d’Eufor Tchad, et Atalante. Les Britanniques ne sont cependant pas partie à la Coopération Structurée Permanente (CSP).

Coopérations hors UE

Les Britanniques sont également insérés avec la France dans des coopérations multilatérales européennes hors UE. Par exemple, le Royaume-Uni est un membre fondateur de l’Organisation de coopération conjointe en matière d’armement (OCCAR). Ainsi, il a participé avec la France au développement de l’A400M ou du radar Cobra. Aujourd’hui, le SLAMF est développé via l’OCCAR. Enfin, la participation à l’Initiative Européenne d’Intervention (IEI), lancée par la France, est le symbole de la volonté britannique de continuer à concourir à la sécurité de l’Europe même après le Brexit.

Les relations bilatérales et multilatérales entre la France et le Royaume-Uni sont donc solidement enchevêtrées. Cependant, le Brexit pourrait les affecter à long terme.

Le Brexit : pas d’effets à court terme, mais un éloignement progressif possible.

Si à court terme le Brexit ne devrait pas influer sur la relation de défense franco-britannique, à long terme les deux pays pourraient s’éloigner, car leurs horizons stratégiques sont différents.

La coopération bilatérale devrait rester stable

L’essentiel de la coopération étant bilatéral, le Brexit devrait avoir peu d’effets. Par exemple, en juin 2019, la Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a reçu ses homologues du Parlement britannique pour réaffirmer l’importance de la coopération de défense malgré le Brexit.

L’inconnue économique

L’impact financier du Brexit sur les accords de coopération est un sujet d’inquiétude. En effet, le Royaume-Uni a dû créer une réserve budgétaire pour faire face aux conséquences du Brexit. En 2018, le gouvernement a refusé une rallonge demandée par la défense. De plus, le coût du Brexit a été estimé à plusieurs milliards d’euros (entre 1 et 7 points de PIB). Néanmoins, en 2019, le budget de la défense britannique a augmenté de 2 milliards de Livres.

Des horizons différents

Le partenaire majeur des Britanniques pour leur défense sont les États-Unis, et leur architecture clef l’OTAN. Or, la France est davantage tournée vers l’Europe et pousse le développement de l’Europe de la défense avec l’IEI. Dans ce contexte, sur le long terme, les deux pays pourraient s’éloigner, le Royaume-Uni se consacrant davantage au special relationship et la France renforçant sa relation de défense avec l’Allemagne dans un contexte européen.

Des propositions pour approfondir la coopération de défense franco-britannique malgré le Brexit (issues d’un rapport de l’institut Montaigne) existent. Il serait possible de créer un conseil franco-britannique annuel de défense et de sécurité, pour renforcer le dialogue entre les deux côtés de la Manche, puisque les Britanniques ne participeront plus aux discussions au sein du Conseil européen. Actuellement, seuls les chefs de gouvernement et les ministres de la Défense des deux pays se réunissent une fois par an. Il serait également souhaitable de mettre en place un cadre formel de partage du renseignement. 

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La relation de défense franco-britannique est donc forte, essentiellement bilatérale, tout en prenant aussi place au sein d’institutions multilatérales. Le fait que le Royaume-Uni quitte l’UE ne devrait que peu l’affecter à court terme, mais sur le long terme, même si le Brexit ne changera pas la géographie, les horizons très différents des deux pays, l’un tourné vers les États-Unis et l’autre vers l’Europe, pourraient conduire à un relâchement de cette coopération.

La capacité de la France à amorcer une dynamique de défense en Europe et surtout la volonté allemande d’y participer influeront donc beaucoup sur le futur de la relation franco-britannique de défense.